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éfiant le temps
et l'entendement, le pittoresque village béarnais de Contade
mérite
indiscutablement une place et une
page
spéciale dans ce site, de par sa spécificité et son
originalité par
rapport à ses consoeurs béarnaises, qui n'en sont pas
dépourvues
pour autant.
Ce pittoresque
village se situe dans le gros
secteur nord du Béarn , confrontant avec les Landes, nommé les
Marches du Béarn . Bien peu de gascons et même , peu
nombreux sont les
béarnais qui en
connaissent l’existence, car ce village se trouve à l’écart des grands
axes
routiers, même pas desservi par une simple route départementale.
Il faut donc
y aller volontairement…ou du moins essayer de s'y rendre,
avec
-indispensable-
une excellente carte ; car les panneaux sont fort rares et mal
entretenus,
de même que les rares chemins qui sont susceptibles d'y mener. (Avis à
ces
messieurs-dames de la Communauté de Communes des Marches du
Béarn)
Allons rendre visite
à ce minuscule village de poche qui fait penser instantanément à ce
vers :
« Mon
village est si petit qu’un rideau de
peupliers le cache aux yeux de tous ».
Arrivé sur place, on a les
sens désorientés et tout de suite la nette impression de se trouver
dans un village de
conte nous
saute aux yeux (impression confuse peut-être due aux formes
douces, arrondies des
petites maisons , la couleur pastel de leurs façades, leur taille
basse…)
, le
calme quasi parfait; une impression de douceur enveloppante,
de
sérénité anesthésiante et d’intemporalité s’en dégage…
La population de
Contade demeure étrangement et depuis la nuit des temps, stabilisée
autour d’une
centaine d’habitants , comme si une sorte d’auto-régulation
démographique,
s’y était exercée rigoureusement, comme si ce chiffre était
indéfectible,
représentait une valeur absolue.
Avec quelques dizaines
d’hectares, le village
serait en superficie le plus petit village du Béarn , s’il n’avait une
enclave dans les hauteurs de la vallée d’Aspe, précisément à
l'introuvable plateau d’Arès. A la vérité, les contadais qui
tiennent à ce qu’on
les appelle arésiens d’ailleurs, sont originaires de ce petit plateau
perdu
bordé de raides versants peu engageants,
voire inquiétants.
La présence des arésiens à Contade s’explique par leur passé
pastoral-nomade, car
lors de leur bi-transhumance annuelle, ils faisaient une
halte dans un endroit qui deviendra plus tard : Contade, leur
lieu
d'élection définitif (countade indique un lieu où l’on
compte, un lieu
où l’on se repose…tout en comptant).
Je vais donc vous conter
l’histoire de Contade, qu'on
prononce Countadè , puisque
Countade
veut également dire en béarnais: « Qui
vaut d’être conté »

>le plateau d'Arès<
(on peut apercevoir à l'arrière
plan, la masse pyramidale du pic de Countende)
|
Contrairement à leurs
congénères valléens qu'ils soient aspois , barétounais , ossalois
, voire ouzoumais, qui se déplaçaient le long de lignes de
crêtes, évitant de
traverser plaines marécageuses, bois , rivières et de déranger leur
coreligionnaires qui auraient pu à l'occasion se montrer menaçants
, (ne
prisant pas l'expression"marcher sur nos plates-bandes") ils
suivaient un tracé qui leur était propre et à vrai dire, peu orthodoxe.
En effet, ils
suivaient tout simplement une ligne droite, choix qui devait
les amener
certainement à se perdre dans d’immenses forêts touffues, patauger dans
de
non moins immenses marécages nauséabonds et à risquer des affrontements
avec
les carnassiers, surtout les loups fréquents jusqu'au XIX° siècle en
Béarn. Contade était en fait sur leur trajet, un
des rares lieux dégagés , relativement sains , secs et relativement
plats , d’où
leur choix. Ce lieu ne leur servit très longtemps que de halte
provisoire car
ils remontaient bien plus haut dans les Landes, jusqu’aux abords de
Dax.
Le pendule de leur
pérégrination oscillant des Landes au plateau d’Arès finit au fil du
temps
et par la force des choses, par se stabiliser à Contade , peut-être
pour y laisser reposer des bêtes ou des personnes
faibles ou malades, voire... Leur village fut longtemps méconnu car
seuls les
arésiens connaissaient les infimes sentes serpentant au milieu des
marais, eux
seuls connaissaient les quelques trouées dans les bois touffus , qui
permettaient de conduire à ce qu'ils considéraient comme leur oasis.
Par rapport à leur halte
landaise nommée Countade-de-Bach
(qui deviendra Aqua Tarbellicae sous la domination
romaine) , leur
village prit un temps le nom de
Countade-de-Haüt
(Aqua Sebon) . Leur
environnement biotopique les amena naturellement à prendre et à priser
des
bains de boue (en fait une excellente argile) et leur y trouver maintes
vertus.
Naturellement ils appliquèrent cette habitude dans leur lieu de vie
hivernal
, soit Countade de Bach ; qui
était en fait l’embryon de
Dax. A ce sujet, il reste toujours à Dax (dans la cité thermale) une
source à
la générosité infaillible, dite La
Contade qui appartient toujours à notre village et pour
laquelle il
perçoit toujours de généreux dividendes financiers à l’image de la Z.I
du
Pont-Long pour les pasteurs de la vallée d’Ossau.
Cet
environnement les amena logiquement à construire des maisons en briques
crues dont
il ne reste qu’un exemplaire d’origine, mais quel exemplaire !
Ce fait
n’est pas rare en soi, mais l’originalité en réside dans sa forme
circulaire …effet que renforce sa situation au centre d’une sorte de
petit
cratère, propre à solliciter l'imagination.
Les
érudits pensent qu’il s’agit à la fois d’une maison communale et d’un
lieu de culte..Toujours est-il qu’il semble bien que son érection soit
très
, très ancienne, vraisemblablement du premier millénaire
, ce qui doit en faire à coup sûr, la plus ancienne
construction
béarnaise. Le bâtiment visible actuellement a pris , selon ces mêmes
spécialistes, la place d’un plus ancien encore : il y a donc
eu
répétition –duplication à l’identique- de la même demeure à plusieurs
reprises, ce qui en fait une sorte de fossile architectural et
ethnologique.
Le toit de cette surprenante habitation est fait encore
traditionnellement
de chaumes de roseaux enchevêtrés, lesquels parsèment encore les
quelques
résidus paludéens. La photo de ce bâtiment est très célèbre ;
on la
retrouve dans des plaquettes touristiques, et elle a parfois fait le
tour du
monde à la une de certains magazines spécialisé . Hélas, il est
rarement
indiqué que c’est une bâtisse béarnaise , d'où la
stupéfaction que l'on a lorsque l'on se trouve face à elle.
Cet
environnement particulier, la pratique séculaire, voire probablement
millénaire des bains de boue, l’osmose
entre l'humain et l'argile, amena naturellement les contadais-arésiens
à
adopter pour dieu ; ce qu’on pourrait appeler le dieu de la
boue,
représenté en forme de colombin spiralé . Ils l’ont appelé
Pay Bou, par
défaut, car il semble bien que le nom d’origine
se soit perdu dans la nuit des temps.
Pay Bou ; arrière-grand-père en béarnais, symbolise en fait
tous les
ancêtres, toute la lignée. Certains jours de l’année, l’idole est
amenée
en grande pompe depuis l’église où elle est conservée, et placée au
centre
de la maison circulaire où elle est l’objet de témoignages de
vénération accompagnés de manifestations devenant
hystériques. au fil
des heures. Le rituel est toujours le même : les
villageois font
plusieurs fois le tour de la maison et ce de plus en plus vite (comme à
La
Kabaa de La Mecque) et sur un signal invisible du chef de meute
(généralement
le plus vieux villageois qui fait habituellement office de maire) les
croyants s’immobilisent
tous soudainement. Dès lors, une file s’organise et s’oriente vers une
certaine direction en évoluant sur une cadence supra- normale,
indéchiffrable,
en décrivant une ellipse. Puis le processus se poursuit par vagues
successives,
jusqu'à épuisement des danseurs.
Après moult calculs, les ethnologues ont déterminé que la
file s’orientait
toujours quelle que soit le jour de la fête, en général à
l’intersection
de chaque saison,
vers la planète Mars. Ce rapprochement est d’autant
plus curieux que
le plateau d’origine des autochtones se nomme Arès,
nom grec du dieu de la guerre : Mars

>La maison cultuelle millénaire<
(contre la façade, le tapis de
prière)
Sur ce même
plateau d'Arès fut trouvé ce que l’on a longtemps cru être un
menhir ;
mais qui s’est avéré être en fait après de minutieuses recherches, un
tronc fossilisé, ressemblant à s'y méprendre à un totem. En y
regardant de plus près, des chercheurs
ont décelé des marques bizarres, des signes
ésotériques, dont les
inévitables spirales et ellipses (sensiblement les mêmes que sur la
fameuse
pierre pétroglyphique de Buzy, déposée au musée d'Arudy, et
qui attend
depuis des lustres d'être déchiffrée ) , ce qui accroît la
perplexité
lorsqu’on sait le nombre de millénaires nécessaires pour que le bois se
pétrifie. Ce totem était au centre d’une sorte de cirque, d’arène
délimitée par des blocs de granit taillé servant sans doute de sièges
aux
dignitaires et devait être le lieu où se tenaient les assemblées
importantes.
Le nom d’arèa sous lequel on désigne cet emplacement passe logiquement
pour
être à l’origine d’ aréopage (assemblée d'érudits)….Cette racine d’Arès
se retrouve également dans arèas qui signifie granitique, en gascon
( voir dans le même secteur, les arres d'Anie, dits aussi lapiaz );
apportant une confirmation supplémentaire à l'hypothèse
précédente.
Au
solstice d’été, le même rituel qu’à Contade se déroule ici, avec ses
incroyables et uniques danses orientées, défiant l'entendement et les
lois de
la physique. Concomitamment , le maire également gourou de
cette
cérémonie, prononce des paroles rituelles, transmises oralement; las,
beaucoup
de formules incantatoires originelles se sont perdues dans la nuit des
temps et
il ne reste plus qu'un discours de raccroc , un puzzle linguistique aux
phrases
hachées, très
souvent terminées par des é déquéro é déquéro ,
signifiant etc , etc
, en béarnais .
En prenant bout à bout
tous les indices rencontrés, nous sommes forcés objectivement
d’envisager dans le
cas présent une origine plus qu’originale, à tout le moins très
lointaine…dans
le temps et probablement dans l'espace. Si l’on considère la conduite
d’évitement
de la population locale, amenée à adopter ce comportement pour
semble-t-il se
protéger /aux invasions barbaresques successives , aux intrusions
ponctuelles
potentielles et faire perdurer une certaine pureté, on est amené
insensiblement à faire l’hypothèse qu’elle pourrait être
d’essence
extra-terrestre et par la même occasion, cette population -qu'on serait
tenté
de nommer ethnie- constituerait en fait la cellule-souche des
béarnais, précédant de fort longtemps ibères, basques,
ligures ,
celtes, wisigoths etc.... Le doute n’est vraiment plus permis
lorsqu’on étudie avec
précision le système de drainage pratiqué à Contade-city…Il a été
établi tout dernièrement, avec une quasi certitude que
l’entrecroisement des canaux qui a
permis de drainer les marais, correspond exactement à celui
d’un
certain secteur de la planète rouge: Mars.
Ce village,
cette communauté , ont
gardé jalousement leur secret et n’ont toléré au fil
des
millénaires, ni chef étranger, ni curieux d'aucune sorte. C'est ainsi
que lors
de la dernière guerre , on ne vit nul teuton pointer à Contade, le bout
de son
casque et nul prussien fureter dans ces lieux patibulaires. On peut
tout de
même se poser la question vu la pratique de
l'omerta toujours
vivace céans.
Ce strict
isolement a permis à la cité d’être épargnée par de nombreuses
épidémies et autres épisodes guerriers. En outre, le village eut une
existence indépendante, nul seigneur ne s’y étant apparemment pas
intéressés . Il y en eut peut-être, mais mal leur en prit, et il y a
beaucoup
de chances qu’ils finirent leur vie dans le "Hourat de lous
ségnous" (trou des seigneurs) , voisinant avec le "Hourat
de lous aütés"
(trou des autres), punis par leur trop grande curiosité ou leur
inconscience.
Légende ou non, laissons perdurer le mystère.
Un dicton confirme la qualité de la vie régnant ici autrefois
: "A
Countende , que soun toustém coutén"
"(A Contade, ils sont toujours contents;
jouant sur les mots voisins de countade et countende).
Mais ce dicton a un double sens car Countende signifie lieu portant à
contestation, ce qui se veut ironique vu qu’un que les villageois
environnants
n’enviaient pas du tout la situation malaisée , inconfortable des
arésiens… (ou qu'ils jugeaient comme
telle).
Il est surprenant de constater que ces 2 mots de contade et countende
ont
cheminé de concert à travers le temps, leur sens étant souvent
confondu,
assimilé; ce qui n'est pas étonnant puisque à l'origine, les endroits
où se
reposaient les bêtes et qui petit à petit devinrent des escales que les
pasteurs annexaient, étaient évidemment contestés par les riverains.
Pour
conclure sur ce chapitre , lors de leur fête communale du 1° avril (qui
remonte au moins à l'an 576 comme en fait foi le premier écrit
intégralement en
béarnais relatant cette date , et paru à l'occasion de la profession de
foi du
nouvel évêque de Lescar) les
arésiens brandissent fièrement à travers leur village leur blason ,
rouge
comme il se doit, couleur du dieu de la guerre où bien en
évidence en son
centre , trône leur idole épileptoïdale
que des esprits mal intentionnés osent comparer
vulgairement à un étron.
Elle
surmonte la devise countadienne :
"Mars et ça repart".
L'opposition du
conseil municipal opterait pour un
changement et préfèrerait une devise plus parlante, telle que celle-ci
:"
Aü cèü ey la bertat" (au ciel se trouve la vérité)
...débat en cours !
Si le premier
avril est traditionnellement
consacré aux manifestations mystiques, le 2 avril est immémorialement
la
journée des jeunes qui ont carte blanche pour la cette
circonstance
exceptionnelle. . La principale distraction de ceux-ci
consiste à se jeter tout nus, tous sexes confondus dans le marigot
argileux
dans lequel ils s'ébattent comme de gras gorets et d'où ils ressortent
méconnaissables. Ensuite, ils pourchassent les spectateurs imprudents,
qu'ils enduisent de
cette même boue ou sur lesquels ils jettent des boules
d'argile . Bonjour
l'ambiance !!!
Ce genre de "spectacle" s'est répandu
depuis
Contade, des 2 côtés des Pyrénées. Tout innocent qu'il paraisse, ce
spectacle participe de la cérémonie et sert en quelque sorte
d'initiation aux jeunes pubères qui, à travers leurs jeux
enfantins,
rendent hommage au Dieu de la boue, auquel ce peuple porte une intense
et
éternelle dévotion.
Ainsi commence et se termine pour ce peuple
ancestral, vraisemblablement
à l'origine du peuplement pyrénéen , leur année .
PS
= Ce
village a fait l'objet d'une émission particulière sur France Bleue
Béarn le 1° avril 2004
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